L'économie iranienne est en train d'être « brisée »


Le porte-avions américain Abraham Lincoln a pris dimanche la relève du John Stannis dans le golfe Persique.

Le cours du rial iranien s'est un peu plus effondré après l'annonce des sanctions décidées par l'Europe. En plus des contrats pétroliers, ces sanctions visent les transactions internationales de la banque centrale iranienne, renforçant des mesures similaires déjà mises en oeuvre par les Etats-Unis.

L'Iran a vu la valeur de sa monnaie divisée par deux face au dollar au cours des derniers mois. L'impact sur l'inflation et sur la manne pétrolière semble déjà être énorme (le pays tire l'essentiel de ses devises des exportations de brut).

L'économie iranienne est en train d'être « brisée », estime l'économiste d'origine perse Fereydoun Khavand, interrogé par Le Point. Selon InsideIran, un site iranien d'opposition basé à Washington, la réaction des Iraniens face à la situation économique « oscille entre la panique, le désespoir et la colère ». Un ouvrier iranien père de quatre enfants témoigne : « Je ne peux déjà me payer de la nourriture que pour la moitié du mois. Si les prix augmentent encore et les salaires ne bougent pas, nous allons mourir. »

L'Iran a la capacité de bloquer (au moins provisoirement) le détroit d'Ormuz, l'artère pulmonaire de l'économie planétaire par laquelle transite un cinquième du brut extrait dans le monde. Cette éventualité est devenue un peu plus plausible depuis l'embargo européen. Un baroud d'honneur pourrait tenter ceux qui tiennent la République islamique, s'ils étaient acculés à la fois par les sanctions occidentales et par une nouvelle révolte populaire. Une telle révolte est toutefois jugée improbable à cette heure, tant la répression a été terrible depuis les manifestations contre le pouvoir en 2009.

« Je ne vois pas l'intérêt stratégique de fermer le détroit », déclare à Reuters un haut gradé occidental, « (mais) il est clair qu'ils nous trouvent aussi durs à comprendre que nous-même les trouvons durs à comprendre. »

D'après Robert MacNamara [1h17], c'est la capacité à comprendre l'adversaire qui distingue la résolution de la crise des missiles de Cuba en 1962 de l'escalade du conflit au Vietnam quelques années plus tard. Sur le site d'Al-Jazeera, un commentateur dresse la (longue) liste des erreurs passées commises par les Etats-Unis à l'égard de l'Iran.

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Face à l'Iran, de l'autre côté du golfe Persique, les potentats saoudiens n'ont jamais eu aussi beau jeu. Le pétrole saoudien serait le seul à pouvoir compenser une diminution des exportations de l'Iran. Moins encore que d'habitude, nul ne peut refuser quoi que ce soit à l'Arabie Saoudite, qui a pu stopper l'an dernier à Bahraïn le feu des révoltes populaires du Moyen-Orient allumé par les manifestants iraniens en 2009.

L'Arabie Saoudite a signé le 15 janvier un pacte de coopération nucléaire avec... la Chine ! A des fins pacifiques, bien entendu.

L'aide technologique promise par Pékin (l'un des plus gros consommateurs de pétrole saoudien) succède à des accords similaires signés avec la France, l'Argentine et la Corée du Sud. Riyad compte construire seize réacteurs nucléaires d'ici à 2030.

L'Arabie Saoudite a besoin du nucléaire (civil) parce que les Saoudiens consomment de plus en plus de pétrole, menaçant de réduire les capacités futures d'exportation du royaume. Un peu comme en Iran, en somme : les extractions de brut du plus vieux producteur du Moyen-Orient déclineront d'ici à 2015, pronostique l'Agence internationale de l'énergie...

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